Comment allons-nous commémorer les événements de 1917 ? Les descendants de l’émigration blanche doivent avoir à coeur de se mobiliser et de s’organiser. Russky Most appelle à la constitution en France d’un Comité de Coordination pour 2017 et espère que nos associations pourront établir un contact avec celles d’autres pays.
Comment les descendants de l’émigration blanche vont-ils marquer l’anniversaire des bouleversements qui ont entraîné la Russie dans une spirale autodestructrice, contraignant leurs familles à l’exil et vouant les leurs restés sur place à la mort, ou à une destinée amère ?
Afin d’assurer une préparation efficace de ce moment historique, nous souhaitons la formation en France, le plus rapidement possible, d’un « Comité de coordination pour 2017 ». Il devrait rassembler les responsables de nos différentes associations, dans l’esprit de ce qui s’est passé en 1988 pour le Millénaire du Baptême de la Russie. Ce Comité serait chargé de définir, organiser et coordonner les actions à mener.
Dans toute la mesure du possible, il devrait tâcher de contacter, dans d’autres pays, les associations de même type et faire connaître son programme en Russie. La tragédie de 1917 a dispersé nos familles dans toute l’Europe, en Amérique, en Asie, en Australie et en Afrique. Il serait merveilleux de pouvoir témoigner tous ensemble, ne serait-ce qu’un jour, dans la dignité et le recueillement, avec le soutien et la bénédiction de l’ensemble de nos hiérarques. Utopie ? Qui sait. Quelques actions simultanées pourront peut-être se concrétiser. Les bouleversements et les conséquences de l’année 1917 ont été tels qu’il serait bien triste d’en limiter la commémoration à une ou deux manifestations isolées.
Le Comité aurait également pour tâche d’élaborer un calendrier des principaux événements à évoquer au cours des prochaines années. Ce n’est pas une, mais plusieurs années de travail de mémoire qui nous attendent – au moins jusqu’en 2020. Il ne faudrait pas oublier, non plus, en particulier dans le cadre des offices religieux, qu’en 2017, la Russie sera confrontée au souvenir de 1937 et de ses terribles purges. Le lien entre ces dates est évident *.
Le thème de 2017 est au centre des préoccupations du groupe de réflexion Russky Most depuis sa création en automne 2011. Le contexte, cependant, a changé, apportant de nouveaux éclairages. Les recherches historiques sur cette période (notamment sur les financements étrangers du mouvement révolutionnaire) ; l’aggravation actuelle des tensions internationales ; le réveil d’une russophobie hystérique qui nous révolte ; mais aussi – hélas – la réaffirmation en Russie, par certains, du mythe de la «date grandiose de la révolution », voilà autant d’éléments à analyser – sans négliger d’agir.
L’Histoire est ce qu’elle est. Contrairement aux Bolcheviks, les descendants des « Blancs » ne cherchent pas à la réécrire. Nous voulons simplement y retrouver notre juste place. Notre rôle est de continuer à perpétuer le souvenir des nôtres et, dans toute la mesure du possible, de transmettre aux Russes d’aujourd’hui ce dont nous restons, quoi qu’il arrive, dépositaires. Ces centaines de milliers de personnes dont la vie fut saccagée, ces photos jaunies, ces drapeaux usés, ces récits que nous portons à jamais dans notre cœur, c’est notre « régiment immortel » ** à nous. Il mérite lui aussi le respect.
C’est au nom de ce pan de la mémoire russe que nous voulons faire vivre, envers et contre tout, que Russky Most soumet quelques pistes à la réflexion de tous. Prouvons que nous sommes capables de nous unir quand il le faut.
SE SOUVENIR DE LA TRAGEDIE DE 1917
1. Dans les pays d’émigration
Les suggestions ci-dessous illustrent quelques-unes de nos idées. Un document plus complet est en préparation. Nous serons heureux de le présenter au futur Comité et de développer ces thèmes avec tous ceux que le sujet intéresse, en France comme en Russie, ou ailleurs.
- Célébration de services religieux dans nos églises et nos cimetières. L’expérience en matière de « panikhide internationale simultanée » déjà acquise par l’Union des Descendants des Combattants Russes de Gallipoli pourrait utilement être mise à profit. Dans l’idéal, ces offices devraient associer les différentes juridictions orthodoxes de l’émigration.
- Définition d’un programme culturel approprié.
- Rédaction d’une Déclaration commune adressée aux Russes d’aujourd’hui. Il est essentiel de faire entendre la voix de l’émigration, alors que des comités d’organisation pour 2017 commencent à se constituer en Russie – sans le moindre contact avec nous. Cette Déclaration pourrait être proposée aux associations de descendants résidant dans d’autres pays d’émigration.
- Création sur Internet d’une banque d’images faisant mémoire des membres de nos familles qui ont connu les années de la guerre civile. Ce pourrait être un projet motivant pour les jeunes membres de nos associations, tout en resserrant les liens entre générations.
- Dans les années à venir, pose de quelques plaques commémoratives (en accord avec les autorités locales, bien entendu).
2. En Russie
Que la Russie ait en ce moment bien d’autres priorités n’est pas une raison pour ne pas exprimer quelques-uns de nos souhaits et espérer convaincre. Nous refusons de vivre 2017 dans le regret de n’avoir rien tenté pour nous faire entendre.
- Notre premier vœu tombe sous le sens : voir enfin la dépouille de Lénine quitter le mausolée de la Place Rouge. Ce serait « le » geste fort qui permettrait de lancer un véritable processus de réconciliation. Rappelons incidemment que le défunt souhaitait être enterré auprès de sa mère. Quant au mausolée lui-même, il pourrait devenir un lieu de mémoire sur la guerre civile, tandis qu’une plaque rappellerait sa destination première.
- L’inauguration à Moscou, en février 2017, de la future cathédrale dédiée aux « Néo-Martyrs et Confesseurs de la foi sur le sang », sur la Loubianka, sera un moment très fort pour tous les chrétiens orthodoxes. Mais nous espérons que seront célébrés toute l’année, un peu partout en Russie, d’autres offices religieux en mémoire des innombrables martyrs de l’époque. Bien entendu, le projet communiste d’imposer, au centre de la place de la Loubianka, le retour de la statue de Dzerjinsky *** , ou toute autre idée du même genre, serait en contradiction absolue avec tout espoir de guérir les plaies du passé.
- Sans esprit de revanche, nous souhaitons ardemment, depuis bien longtemps, des changements dans la toponymie qui rend obstinément hommage à des bourreaux avérés (noms de villes, de rues, de stations de métro…). Et que l’on ne nous dise pas que cela compliquerait trop la vie des habitants : les noms modifiés pourraient être utilisés dans les deux versions, le nombre d’années nécessaire (au renouvellement des documents administratifs).
- Nous aurions encore bien d’autres souhaits, concernant notamment l’ouverture des archives, les manuels scolaires, ou encore la création audiovisuelle, mais chaque chose viendra en son temps – espérons-le.
RUSSKY MOST
XycNBVFS